Les habitants de la ville de Kananga, chef-lieu de la province du Kasaï-Central observent depuis près de deux semaines une montée vertigineuse du prix de maïs sur le marché.
La mesurette de 2,5 kilos appelée “meka” qui se négociait, il y a peu, entre 1500 Fc et 2000 Fc, se vend actuellement à 4000 Fc, voire 4500 Fc, selon les humeurs des revendeurs.
Ce prix, qui ne connait aucune régulation de l’autorité publique en la matière, se fixe selon la spéculation du marché.
Le maïs est devenu, à ce jour, la denrée la plus rare car les stocks sont gérés à la seule volonté des fournisseurs.
Cette situation constitue une désolation du côté des revendeurs qui ont du mal à faire tourner leurs activités à cause de la rareté de ce produit de première nécessité dans les différents coins de ravitaillement.
“Tous les dépôts sont vides, il n’y a plus de maïs. On nous le livre sporadiquement et en petite quantité. Les locomotives qui viennent d’Ilebo ne tractent plus de grandes quantités de maïs, qui arrive dans un seul wagon. La bousculade est totale pour se procurer ne serait-ce qu’un meka et la quantité se termine en peu de temps. Le maïs ne se laisse pas voir. Moi je suis vendeuse et j’ai sillonné partout pour avoir même un sac et je n’ ai rien trouvé”, explique Céline Ngalula, revendeuse rencontrée au marché Kamayi.
Une autre nommée Tshituka Monique rencontrée au marché Nkashama précise que cette crise affecte leurs activités soutenant qu’elles n’arrivent pas à se faire des bénéfices pour prendre en charge les membres de leurs familles.
“Le marché de maïs est vide. Nous, les revendeurs, avons notre argent pour se le procurer. Mais, on ne sait où s’approvisionner. Parfois,, nous payons un sac à un prix exorbitant soit 150.000 Fc, pour avoir le bénéfice de 1000 ou 2000 FC seulement à la vente. Comment pouvons-nous nous en sortir avec nos enfants ?”, s’interroge Monique.
Dans la foulée, certains revendeurs pointent du doigt certaines Agences humainitaires qui, selon eux, seraient à la base de cette rareté en achetant en grande quantité cette denrée qu’elles distribuent dans les villages, même ceux qui étaient considérés comme greniers agricoles. Ces interventions des organisations humanitaires qui s’adonnent à la distribution de maïs et autres denrées alimentaires dans les milieux ruraux, ont affaibli les paysans qui ne savent plus prioriser l’agriculture en vue de ravitailler la ville.
Face à cette situation, certains ménages se trouvent dans une situation de précarité caractérisée par l’aménuisement de leur pouvoir d’achat. Muleka Nathalie, venue pour s’approvisionner dans le marché Kamayi est perplexe quant au choix à opérer vu la taille de sa famille nombreuse.
“Je ne vois pas comment acheter le maïs parce que le prix est vraiment exhorbitant. J’ai neuf enfants à la maison et jusque là, je circule encore parce qu’avec l’argent que j’ai, en tout cas, je ne sais quoi faire. Que l’Etat s’implique pour trouver la solution à cette crise”, lance-t-elle.
Un opérateur économique, qui ravitaille la ville en ce produit, que nous avons approché, évoque des raisons liées à la baisse de production consécutive aux effets des conflits intercommunautaires de Bakuakenge, une localité qui était disputée entre le Kasaï et Kasaï Central.
Michel Wembo explique que ce conflit a mis en mal les relations entre ces deux provinces sœurs et depuis lors, beaucoup de maïs qui venaient de la province voisine du Kasaï à travers la gare de Bakuakenge sont orientés actuellement vers la ville de Kinshasa.
Cependant, ajoute ce commerçant, le gouvernement provincial devrait renforcer la production locale en accordant des espaces aux opérateurs économiques et trouver un mécanisme d’accompagnement pour qu’ils cultivent en vue de lutter contre la dépendance alimentaire et inonder les marchés de Kananga.
Du côté comité d’acheteurs et évacuateur des produits agricoles (CEPA), on évoque également la baisse de la production qui est liée notamment aux effets de changement climatique.
“S’il y a hausse de prix, c’est parce que la quantité de maïs produit a diminué pendant cette période. Il y a la perturbation climatique avec des pluies qui ont dérangé la production depuis le mois de janvier et comme il n’y a pas beaucoup de stock sur le marché, cela influence toujours la hausse de prix”, a fait savoir le président de ce comité.
Georges Mukenge, précise par ailleurs que des mesures ont été déjà arrêtées au niveau du nouveau gouvernement provincial pour décanter cette situation.
“Nous venons de sortir d’une réunion avec le Gouverneur. Parmi les mesures prises, nous avons trouvé qu’il fallait qu’on tende la main à Lubumbashi, au Haut Katanga et de l’autre côté de Lunda Norte en Angola. Et ce sont les voies de sortie que nous avons trouvées pour abonder les marchés. Nous pensons que d’ici deux semaines nous pouvons avoir l’abondance de maïs”, renchérit-il.