
Dans l’amphithéâtre Marcel Lihau, au siège solennel de la Cour de cassation à Kinshasa, les mots ont résonné comme une convocation à la conscience ce lundi 7 avril. Félix Tshisekedi, le ton ferme, ouvre la toute première Assemblée générale ordinaire du Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM). Une première depuis la naissance de cette instance en 2008. Dix-sept ans de silence institutionnel, brisé en direct.
Ils sont plus de 250 hauts magistrats, venus des 26 provinces, rassemblés pour dix jours de débats sur l’avenir du pouvoir judiciaire. Dix jours pour se regarder en face, faire le bilan, évaluer les fractures, redessiner les contours d’une justice congolaise trop souvent soupçonnée, parfois désavouée. Et surtout, entendre ce que le peuple attend : un sursaut.

Le Président de la République, en magistrat suprême, n’a pas mâché ses mots.
« Depuis mon accession à la magistrature suprême, j’ai toujours affirmé ma conviction que la justice est le pilier central de notre État de droit, une justice indépendante, efficace, protectrice des droits humains et rassurante pour tous », martèle-t-il.

Et d’enfoncer le clou :
« Je vous appelle à renaître, mais surtout à redonner espoir, à réaffirmer avec courage et fermeté votre rôle de sentinelle de la République ».
Renaître. Le mot est lancé. Le symbole est fort. Il fait écho au thème choisi pour ces assises :
« La renaissance d’une magistrature au service du peuple. »
Car les attentes sont immenses, à la mesure des frustrations accumulées.
Dieudonné Kamuleta Badibanga, Président de la Cour constitutionnelle et du CSM, en a dressé le tableau : nomination de 5 000 magistrats en deux vagues (2023 et 2025), féminisation partielle des hautes juridictions, début de couverture sociale, traitement de dossiers disciplinaires jusque-là ensevelis. Des avancées, certes, mais encore bien loin de répondre à la crise de confiance qui mine les cours et tribunaux.

Le menu de l’assemblée est dense : recrutement, formation, discipline, retraite, infrastructures, communication, finances, vie sociale des magistrats. Autant de nœuds à défaire pour éviter que le « pilier central » de l’État ne reste un édifice bancal.
Le Président Tshisekedi, lui, a posé le cadre. Le CSM doit poser les actes. L’histoire, elle, jugera.
LUKEKA KALUME