Ce lundi 20 mai, le tribunal de Tshikapa, au Kasaï, a ouvert un procès mettant en accusation une dizaine d’anciens miliciens Bana Mura, des responsables politiques locaux et des représentants des forces de sécurité congolaises.
Ces individus sont accusés de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité perpétrés entre 2017 et 2018 dans le territoire de Kamonia. Ce procès s’inscrit dans le cadre des violences meurtrières qui ont secoué la région du Kasaï entre 2016 et 2019.
Un contexte de conflit sanglant
Pour rappel, le Kasaï avait été le théâtre d’affrontements violents entre les partisans du chef coutumier Kamuina Nsapu et le gouvernement de Kinshasa de l’époque. Ces combats, exacerbés par des tensions interethniques, avaient entraîné la mort de milliers de personnes et le déplacement forcé de 1,4 million de résidents. L’ouverture de ce procès pourrait marquer un tournant en mettant en lumière la responsabilité de certaines autorités congolaises dans les atrocités commises pendant cette période sombre.
Les accusations portées contre les prévenus
Parmi les accusés figurent des personnalités de divers horizons, dont un commandant de la police congolaise, des chefs de village, un ancien député national et un ancien vice-gouverneur de la province. Tous sont soupçonnés d’avoir participé à la formation et à la conduite de la milice Bana Mura, impliquée dans des actes de violence effroyables contre les populations civiles.
Des crimes de masse d’une brutalité inouïe
La milice Bana Mura, constituée en mars 2017, aurait été formée en réponse aux attaques de la rébellion Kamuina Nsapu. Ses membres sont accusés d’avoir mené des massacres à caractère ethnique ciblant principalement les populations de la tribu Luba, perçues comme alliées ou sympathisantes de la rébellion. Les actes de barbarie rapportés incluent l’incendie de villages entiers avec des habitants piégés à l’intérieur, des tortures, des meurtres par balles, et l’enlèvement de femmes et de jeunes filles. Ces dernières auraient été réduites à l’esclavage, violées de manière répétée, contraintes à des avortements forcés ou à donner naissance en captivité.
Un procès attendu pour la justice et la vérité
Ce procès est particulièrement significatif car il pourrait dévoiler la complicité de certaines autorités locales et étatiques dans ces crimes. La diversité des profils des accusés suggère une collaboration complexe entre les forces de sécurité congolaises et les milices locales, impliquant des niveaux élevés de coordination et de soutien logistique pour perpétrer ces atrocités.
Le verdict de ce procès est attendu début juin et pourrait représenter un pas majeur vers la justice pour les victimes et leurs familles, tout en offrant une opportunité de reconnaissance des souffrances endurées par la population du Kasaï durant ce conflit dévastateur.
Basile MUYA